L'étalon était couché sous un arbre et là dehors, la pluie s'acharnait sur le paysage, une forte averse en ce lieu de la mort. Joakin attendait la venue de la faucheuse et puis, tête forte comme il était, ce ne serait q'un défi de plus pour la personne qui se pointerait dans le chemin de la... mort.

La brume l'attirait, et, se riant de la pluie, la petite bicolore avançait le long du chemin caillouteux, son regard ardent fixant la brume qui entourait le sommet du mont, qu'elle ne savait pas être un volcan. Elle en était loin, mais téméraire, la jeune femelle s'était lancé le défi d'y parvenir. Mais plus elle avançait, et plus son but semblait lointain. Soupirant, Allie ralentit le pas, ses yeux ambrés parcourant les environs, jusqu'à s’arrêter sur un arbre au loin, sous lequel semblait somnoler la silhouette massive d'un étalon. Animée d'un nouvel entrain, la paint entreprit sa marche vers lui, ses oreilles reculées pour éviter les trombes d'eau qui tombaient sur son dos.

L'inconnue approchait et plus l'odeur devenait forte, ce qui le dérangeait un tant soit peu. Joakin ouvrit les yeux et fixa la silhouette qui arrivait au loin, silencieux. La pluie était abondante et glaciale, mais le doré adorait ce que cela produisait sur son corps. Depuis le décès d'un membre de sa famille, son coeur s'était rudement fermé et tout ceux qu'il rencontrait était toujours agacé par sa forte tête têtue.

De la même façon que l'étalon isabelle, Allie adorait la sensation des gouttes tombant avec force sur son dos large, ruisselant le long de ses membres et sous son ventre. Bien entendu, elle n'était pas insensible au froid qui venait avec la pluie, mais en éternelle amoureuse de la nature, la belle faisait avec, pardonnant tous les caprices de Gaïa tant qu'elle la laissait se réveiller chaque matin. S'approchant de l'étalon, la jument inclina brièvement sa nuque pour le saluer, et s'arrêtant, encore sous la pluie, hésitante.

Le mâle l'observait en silence et lorsqu'elle ouvrit la bouche, tout autour de lui se changea, qu'est-ce qu'elle pouvait être rayonnante! Enfin, il fronça les sourcils et se redressa, peu accueillant. « Oui? » souffla-t-il, sur un ton dur.

Évitant le regard de l'étalon, tout à coup gênée, Allie fit un pas en avant, fixant l'arbre au lieu de celui à qui elle parlait. Il lui posa une question - ou un mot plutôt - sec et commandant, et elle tressaillit. " Je ... Bonjour. " réussit-elle à articuler, lui adressant un sourire bref.

Il sourit un bref instant avant de cesser aussitôt. « Oui, bonjour. » lâcha-t-il, de nouveau en s'ébrouant. Elle était timide et se sentait sans aucun doute intimidée par l'étalon, mais le mastodonte n'y prêta que très peu d'attention, tête brûlée comme il était, peu de choses le retenait.

Le caractère taciturne de l'étalon devint soudainement très clair aux yeux de l'intelligente petite pie, comme s'il voulait être gentil, et ne le voulait pas à la fois. Sentant un filet de vent siffler entre ses cuisses et lui arracher un frisson douloureux, la belle hésita pendant un instant, essayant de combattre sa timidité instinctive. " Puis-je vous rejoindre à l'abri ? " lui glissa-t-elle avec douceur, accompagnant ses mots d'un regard chaleureux, comme pour lui prouver qu'elle ne lui voulait pas de mal.

Il était hésitant, sa gentillesse pouvait être éphémère et fausse, mais Joakin accepta la jument pour finalement se décaler de quelques pas. Le mâle l'observait toujours et haussa un sourcil, refaire confiance aux autre, c'était peine perdue et puis, le mastodonte n'avait pas envie d'ouvrir son coeur à quiconque.

Allie accepta son mutisme, hochant la tête en guise de remerciement, et se glissa silencieusement jusqu'à lui, prenant la place qu'il lui avait fait. L'arbre était large, mais ils étaient tout de même contraints à se serrer l'un contre l'autre, et la belle frissonna, gênée, sentant son pelage frôler celui de l'étalon. Pour se changer les idées, son regard se posa sur le paysage à présent détrempé, et ne put retenir un souffle. " C'est magnifique ... " murmura-t-elle à mi-voix, pour elle-même.

Sentant de plus en plus le corps de la blanche frôler le sien, il détourna la tête, se sentant peu à l'aise, désormais. Il souffla bruyamment des naseaux et jeta un regard vif à la petite dame, confus. Par la même occasion, cette même personne ouvrit la bouche pour dire un mot complètement incompréhensible aux oreilles de l'étalon doré comme le sable au couché du soleil.

Allie n'était pas aveugle, ni dupe, ni naïve : elle voyait bien l’inconfort, et à défaut de se remettre sous la flotte pour l'accoutumer, elle ne savait pas quoi faire pour y remédier. A défaut de vouloir le détendre, la petite pie tenta de combler le vide qui s’étirait entre eux. " Vous êtes qui ? "